En 1936, Klaus Mann écrit Mephisto.
Il entend ainsi s’ériger contre la passivité des intellectuels et artistes de son temps qui-selon lui-n’engagent pas une critique du régime fasciste. Pour appuyer la condamnation de ses contemporains, il emprunte au réel la figure de Gustaf Grundgens, un des plus grands acteurs allemands, qui fréquentait l’avant-garde artistique et littéraire sous la République de Weimar avant de se rallier au nazisme sous le Troisième Reich.
L’une des premières intentions de ce projet est de mettre en dialogue et en perspective les questions de fond que soulève l’histoire de Klaus Mann : l’ambition, le pouvoir, l’art, le bien, le mal, l’intégrité artistique…
Pourquoi Hendrik Hofgen décide-t-il de travailler pour le régime nazi ?
Quelle expérience de vie a précédé son choix ?
En quoi le monde de l’art d’alors ressemble-t-il au monde de l’art d’aujourd’hui ?
En quoi le théâtre est-il en mesure de véhiculer des valeurs fascisantes ?
En quoi est-il le lieu exacerbé de ce que l’humanité a de plus bon et de plus mauvais ?
Un spectacle rêvé comme une déclaration d’amour au théâtre, dans tout ce qu’il peut y avoir de kitch, d’excès et d’aliénant.
Un théâtre baroque, de la saturation, du choix du trop.
User de toutes les formes, élargir la palette.
Passer du cabaret au classicisme à l’ultra contemporain, passer du ringard à l’air du temps, passer du chaud des projecteurs aux néons froids. Et puis passer du rire aux larmes, du comique au tragique.
User des signes, des références, des évocations, affirmer une théâtralité où l’architecture est faite de débordements et autres jubilations.
Une théâtralité plurielle comme une manière de traiter l’Histoire(s) : celle des années 1930 et celle des signes, des formes, celle du théâtre.
Mephisto est un spectacle pensé comme une méditation sur les pouvoirs du théâtre : jouer de la fascination pour en interroger les travers.
La compagnie Les Barbares propose des spectacles au souffle épique et romanesque tout en sachant rester populaire et accessible au plus grand nombre. Ils oeuvrent pour un théâtre artisanal, où la parole et la tradition dialoguent avec le présent, un théâtre d’acteur, d’idées et de chair. La démarche cherche à interpeller directement le spectateur, en partageant avec lui des préoccupations communes. Pour autant l’ambition est celle d’un théâtre joyeux, vivant, plein d’espoir qui en interrogeant l’humain et ses contradictions ne cesse de questionner la possibilité « d’être ensemble ».
Leurs créations fait dialoguer les grands mythes qui fondent notre civilisation avec la littérature, pour interroger le présent, tout en utilisant de nouveaux langages scéniques et les rapprochant des voix contemporaines de la dramaturgie.
Mephisto, qu’ils présenteront dans le cadre du festival Départ d’incendies, fait dialoguer le mythe de Faust avec la figure de Gustav Gründgens, cet acteur allemand des années 30, célèbre pour sa compromission avec les nazis.
Dans ce dialogue perpétuel entre les faits historiques et la dimension symbolique qu’ils peuvent représenter aujourd’hui, ils y voient la possibilité de la fable, et par la fable le moyen de conjuguer le rêve et une réflexion sur le monde. Par la fable ils veulent renouer avec la grande tradition théâtrale des années 60 à 80. Cette époque où le théâtre était une grande fête. Le texte un prétexte à inventer des décors extraordinaires, des installations surprenantes, une orchestration de la diction quasiment musicale. Une époque dans laquelle le théâtre était “tout puissant !” comme le dit Florence Dupont.
Les acteurs au centre, et leur puissance démultipliée par la machinerie théâtrale, la lumière, la musique (live de préférence), le son, les costumes et les décors.